'> Fabebook: janvier 2016

lundi 18 janvier 2016

Retour à la nuit - Eric Maneval

- réédition à La Manufacture de Livres  (collection Territori)
2015 - 152 pages

La première version de Retour à la nuit a vu le jour en novembre 2009 aux éditions Ecorce qui venaient d'être créées.
Et si ce roman reste à ce jour le plus vendu de la collection, il n'avait cependant pas encore bénéficié d'une diffusion digne de ce nom, ni donc de la visibilité qu'il mérite. La Manufacture de Livres lui offre une deuxième vie.


"Écoute-moi bien, Antoine. Tu as eu de la chance que je sois là. Tu comprends ? Ne parle pas, fais-moi oui ou non de la tête." Oui. "Je t'ai sauvé la vie. Regarde-moi dans les yeux : je t'ai sauvé la vie, Antoine. Mais si tu veux te faire du mal, je peux te faire du mal. Je peux le faire à ta place, tu comprends ?" Non. "Tu as peur ?" Oui. "Tu as peur de moi, mais tu n'as pas peur de plonger dans une rivière en crue ? T'es un drôle de numéro, toi. Tu vois la bouteille que j'ai dans la main ? C'est de l'alcool à 90°. Je vais en mettre sur tes blessures. Ça va faire très mal. Ça va te brûler et tu vas hurler. C'est moi qui vais te faire mal. N'oublie pas ça : moi je peux te faire du mal. Tu t'en souviendras la prochaine fois que tu voudras mourir." Vingt-cinq ans plus tard, Antoine est veilleur de nuit dans un foyer à caractère social. Il revient sur cette histoire. Depuis cette cascade qui l'a emporté lorsqu'il était enfant, jusqu'à Ouria, cette adolescente à qui il montrera ses cicatrices, une nuit, et qui voudra les toucher.


Mon humble avis :
Antoine est veilleur de nuit au foyer pour enfants "La clairière", un bâtiment isolé au milieu des bois. Le foyer héberge une trentaine d'enfants placés par la justice ou en situation de danger. Leur âge varie entre deux et dix-neuf ans.
C'est un travail qui convient bien à Antoine. Peu fatigant mais pas mal stressant. Le plus dur étant de pouvoir dormir la journée et y associer son travail, établir un certain équilibre. Antoine est de toute façon un solitaire.
Au foyer, il estime bien faire son travail, certains lui donnent du fil à retordre mais Antoine a sa technique et ça fonctionne.
Il y a des petits qui pleurent la nuit, il y a Gaétan, un grand qui la joue "difficile" et puis il y a Ouria, une jeune fille anorexique-boulimique.
Mais Antoine a lui aussi ses problèmes. De son enfance il ne garde aucuns souvenirs sauf celui de son "accident" ...

Les faits se passent en Corrèze, à Treignac, Antoine a alors huit ans quand il décide de sauter en aval du barrage.
Antoine, jeune et téméraire aurait pu y laisser la vie sans l'intervention d'un inconnu, un homme étrange (pour ne pas dire flippant) qui disparaît comme il est arrivé. Antoine passera des mois à l'hôpital.

Des années plus tard sa vie va être bousculée,  le passé ressurgi mais Antoine est-il capable de s'en rappeler ?
Quand l'esprit a fermé la porte aux souvenirs,  lui seul prend le chemin d'un arrangement et des événements vont faire qu'Antoine va devoir faire remonter les images de cette enfance refoulée mais les cicatrices, elles, ne disparaissent pas !

L'auteur nous emmène alors vers ce passé occulté mais aussi vers le présent,  vers ce travail de veilleur de nuit avec ces jeunes en détresse qu'Antoine doit gérer et qui vont se lier.

Pour info, Eric Maneval est non seulement un auteur,  mais aussi libraire et veilleur de nuit dans un foyer pour jeune ! Ceci pour dire que l'auteur sait de quoi il parle, mais surtout parce qu'il a su mettre les mots exacts.
Au fil de la lecture, la petite musique sonne juste, elle est belle ..
C'est un bon livre, bien écrit,  qui jusqu'à l'épilogue m'a non seulement touchée mais aussi intriguée.
A lire ...

Fabe.

samedi 9 janvier 2016

Leblond, la pute et l'homme-enfant - René W. Milly


AVERTISSEMENT : Petit rappel de début d'année.
                                   Je n'accepte aucun service de presse ni ne sacrifirai un avis sincère,  même
                                   au prix d'une éventuelle amitié.


Éditions La cabane à Mots
Collection : Petits meurtres à la Cabane
2014 -418 pages


Solide comme un menhir et guère plus expressif, le fils d’Eugénie Tringlet pénètre dans la galerie. C’est un géant à voix de fausset. Une masse de muscle au service d’une cervelle d’enfançon. Pour dire les choses crûment, chez le Jean-Marie les fondations et les étages sont bien bâtis, mais le budget a été insuffisant pour finir la toiture.
Jean-Marie Tringlet l’homme-enfant, est l’une des figures pittoresques de ce roman noir et rosse dans lequel les personnages sont pétris de mauvais sentiments.
Outre de pertinentes informations sur le destin des œuvres d’arts pillés par les SS, au cours de la seconde guerre, la lecture de Leblond, la pute et l’homme enfant vous permettra, entre autres joyeusetés, d’apprendre : que tremper les croissants du petit-déjeuné dans un verre de pastis peut entraîner de graves conséquences, qu’un tueur serbe voyageant dans un camping-car rose n’est pas un individu fréquentable, qu’être qualifié de demeuré n’empêche pas d’avoir des goûts artistiques développés, que l’utilisation d’un épluche-légumes peut grandement faciliter le dialogue avec une personne réticente.

Mon humble avis :
En France, plus précisément dans le sud-ouest à Figeac, une bagarre éclate au milieu des étals du marché matinal. Ce qui démarre comme une broutille devient une bagarre générale entrainant la mort d'un homme d'un certain âge,  mais il s'avère que  François a été "saigné comme un goret" !

Les personnages se mettent en place : Pierre Leblond, galeriste, vendeur de belle brocante n'est pas là par hasard. Se faire oublier dans un village tel que Gardac pour un homme au passé douteux est une planque parfaite.
Un vieux secret, que partagent des hommes influents, refait surface et pour Maurice Preynac il est impératif de rectifier la donne. Des ordres sont donnés,  des alliances sont formées et de sombres projets se dessinent.
A "La Galerie" Pierre Leblond ne se doute pas encore de ce qui l'attend. Son passé va-t-il le rattraper ? En tous les cas il va devoir sortir de son rôle de pépère tranquille.
L'auteur fait entrer les protagonistes de l'histoire avec aisance, la personnalité de ceux-ci sont fouillés comme il faut sans trop en faire.
Marcelle Castanier est une pute sur le retour dotée d'un caractère à l'acier bien trempé,  elle fera équipe avec Leblond pour tenter de déjouer le piège tendu par Preynac, une équipe qui forme un trio avec Jean-Marie, un bon gros "nounours" d'une trentaine d'année, un simplet monté comme une armoire à glace mais aussi un artiste qui a le don d'utiliser son couteau pour sculpter avec beaucoup de talent toutes sortes de figurines ! Œuvres exposées par Leblond dans sa galerie.
Complots, explosions, poursuites, œuvres d'art volées,  tueurs à gage, politicards et flics corrompus et sexe ... René W. Milly met la gomme, mais pas que ... si l'histoire est bien conçue,  l'auteur utilise l'humour avec beaucoup d'adresse sans jamais devenir lourd de chez lourd, si vous voyez ce que je veux dire. Pas facile de ne pas répéter le même humour avec chaque personnage,  mais sieur Milly y arrive fort bien.
Je ne peux spoiler mais l'utilisation de l'épluche-légumes est très .. heu ... surprenant !
Le pouvoir, la violence, le sexe (oui, oui) et les surprises sont au rendez-vous dans ce roman mi policier, mi humour, mi noir. J'aime les livres qui n'entrent pas spécialement dans une "catégorie". Et puis surtout ce n'est pas un livre où "LE FLIC A RAISON", où la loi fait la morale. Et j'aime ça !
Une histoire qui tient la route, des personnages hauts en couleur, des rebondissements bien ficelés et une fin toute aussi plaisante et inattendue ont fait que ce livre est, pour moi, un super début pour cette nouvelle année.
Un livre que je vous recommande puisqu'il m'a plu à moi !
Seul bémol,  l'allusion sur plusieurs sites, présentations ou articles : audiardesque !!! Audiard étant un dialoguiste, pour ma part il n'est pas de mise à faire la comparaison.
L'humour et les bon mots dans un film et dans un livre sont deux exercices bien différents. Bref, pour moi c'est loin d'être "bancable", d'ailleurs cette allusion, m'avait fait grincer des dents.
Petit message pour René W. Milly : fait donc interdire cette comparaison.

Fabe