'> Fabebook: mai 2014

jeudi 22 mai 2014

Ruben chez les barbares & Le cri de la moule le soir au fond du bar - Charly Green

Les Enquêtes de Ruben Quinquet, Éd. Numeriklivres 2013


Ruben chez les barbares



Angoissant. Là où JeanBé nous venge de la guerre de Cent Ans tout en risquant la pérennité de ses roubignoles.
Incroyable. Puis, c’est Napoléon qui bousille un Congrès de Criminologie.
Textuel. Où Teutons et Carolingiens s’unissent pour sauver Napoléon, malgré l’entêtement d’une lignée d’astiqueuses de binious.
Historique. Où un raccourci d’histoires trouduculières vous confronte avec la Grande Histoire.





Mon avis :
Ruben Quinquet, je vous en ai déjà parlé précédemment (Un pastis sinon rien) est commissaire au port et pas à "l'évêché" le commissariat de Marseille. (Petite précision pour ceux qui ne sont pas au fait des histoires policières se passant à Marseille).
Il est à la tête d'une équipe de déjantés notoires,  il y a JeanBé, le violent de service, celui qui est forcément doué pour obtenir des aveux, à coup de bottin téléphonique et chez qui un bas résille ne quitte jamais le fond de sa poche. Obsédé par les femmes, il est aussi un très bon flic ; le meilleur élément de Ruben Quinquet. Dans l'équipe on retrouve aussi Maxime, l'as de l'informatique.
Le principe des livres très courts (45 à 55 pages) de Charly Green reprenant les enquêtes de R. Quinquet est simple : y aller droit au but mais surtout nous faire sourire tout au long de la lecture. 45 minutes de plaisir ! En effet, l'humour de Green est à chaque pages. On ne s'y ennuie pas un seul instant. Ces livres n'ont aucune prétention,  juste celles de nous délasser !

Ruben s'en va dans le nord pour assister à une conférence,  il s'arrête chez son cousin et se voit curieux et contraint d'enquêter sur le meurtre du voisin ...
Une enquête bien ficelée et toujours aussi joyeuse à lire. Comme les livres sont courts je vous passe les explications et j'opte pour vous délivrer deux extraits.

Pour revenir au matin même, à neuf heures, elle ouvrit avec sa clé la maisonnette d’Albert Lenoir, soixante-quinze printemps au compteur, s’étonna de ne pas voir le café prêt et monta naturellement au premier étage dans la chambre à coucher. Une femme effarouchée pousse des cris aigus, mais chez les techniciennes de surface, les sirènes d’alarme sont surdémultipliées. Elle vrilla les cornets acoustiques de Riquet qui jaillit sur le trottoir séance tenante. La Ginette était déjà dans la rue à ameuter le quartier, les bras levés, elle hurlait :
— À l’assassin ! À l’assassin !
Une longue pratique de la nature humaine lui ayant fait deviner qu’on ne peut, seul, se faire déborder la cervelle…


Avec une clé tout ordinaire, JeanBé ouvrit la porte du petit bureau éclairé par un vasistas et, laissant passer l’imposante Ginette qui préférait s’incruster de biais pour ne pas froisser sa robe neuve, il referma très soigneusement et, d’un geste théâtral, remit la clé dans sa poche, avec ses bas résille.
— Asseyez-vous, je vous en prie.
La Ginette, bien docile, posa son sac en plastique noir verni sur le bureau.
— Pourquoi vous avez fermé la porte à clé ?
— Pour qu’on ne nous dérange pas.
La Ginette crispa le museau, mais s’abstint de dire ce qu’elle pensait. JeanBé s’assit sur la chaise et posa ses pieds sur le bureau.


 Le cri de la moule le soir au fond du bar


Qui n'a jamais entendu le cri de la moule le soir au fond du bar ne connait rien de la vie... C'est émotionnellement subtil quand Bernadette creuse sa grotte elle-même et que Jésus Bouillon fait son premier miracle.
Quand ça dérape, cela merdoie grave dans la moule-frite. Un imbroglio serré comme un string va plonger JeanBé dans le mysticisme pour échapper à la guerre du Kosovo...
Où l'on voit les récalcitrants tétaniser le Commissaire Ruben Quinquet, secouru par JeanBé, l’estralucide. Mais l'équipe de Ruben, soudée par l'Armagnac, va éclater une Mégane et raser un cabanon pour sauver l'honneur.







Mon avis :
Ruben et toute son équipe se retrouvent tous ensemble pour boire et manger la spécialité du bistrot sur la Canebière. Jusqu'au moment où on retrouve le taulier, Robert Ledan assassiné en pleine galipette et qui gît au fond de la cour sur le tas de coquilles de moules, le pantalon sur les chevilles.
Un départ en fanfare pour cette nouvelle enquête de Quinquet et ses hommes sur un ton toujours aussi hilarant.
Même principe, trop court pour ne pas spoiler, alors deux extraits ...  !

Elle était belle et avenante, Bernadette. Avec sa jupette au ras des miches, elle croupionnait en servant les moules. Au menu, c’était moules, frites et miches. Lorsque les gonzes songeaient à regarder ailleurs, ils découvraient des roberts aussi gros que les miches. Total, ils ne savaient plus ce qu’ils admiraient le plus. On tournait en rond et les moules refroidissaient. En attendant, ils buvaient pour se rincer le gosier que tant de trésors affichés asséchaient et Samuel continuait à compter les bouchons. Avec un sourire non dénué d’intentions, Le Robert s’extasiait et s’excitait.

Celle que je préfère, au sujet des cons !!!

C’est vraiment très difficile d’entretenir des relations avec un Con. Pas le con ordinaire, celui qu’on se bichonne, qu’on se peaufine, qu’on aime bien, mais le con absolu, celui qu’on canonise, car il est un summum. Ce genre de con est rare. Il vous déstabilise parce qu’il ne voit jamais les choses comme vous, l’angle de son regard étant plus obtus. Le vrai Con, c’est celui qui ne mesure pas la vie à la bonne aune. Doué pour la poésie pragmatique, il réduit tout à sa mesure, vous minimise l’espace, vous obture une vision qui pourrait lui donner le vertige. Voilà, le con, c’est l’anti vertigineux type. Au sens médical du terme. C’est un remède qui vous protège des grandeurs, des idéaux et des passions dévorantes. Un con, un vrai, c’est un Lexomil en dose maximale. Voilà pourquoi Ruben Quinquet aurait bien mis Gilles Graillou dans un bocal, avec un mélange judicieux de formol et d’alcool. Quand on en a un comme cela, on se le garde…

Pour ceux et celles qui aiment les enquêtes policières et qui veulent se détendre 45 minutes avec un polar déjanté,  je ne peux que vous les conseiller.
Ça fait du bien entre des polars bien noirs,  les zygomatiques en action !
Fabe

vendredi 16 mai 2014

1983 - David Peace - Quartet du Yorkshire 4

Éditeur : Rivages (3 janvier 2008) Collection : Rivages/Noir - Poche: 594 pages




En mai 1983, à la veille d’élections générales que la Dame de fer et le parti conservateur remporteront triomphalement, la petite Hazel Watkins est enlevée à Morley où, en 1974, Clare Kemplay avait disparu (voir 1974 du même auteur). Même si les instances dirigeantes de la police refusent d’établir un lien entre les deux affaires, d’autres jeunes victimes disparues avant Clare refont inévitablement surface : Susan Ridyard et Jeanette Garland. On s’en souvient, c’est sur ces affaires qu’enquêtait le journaliste Edward Dunford. Dans ce dernier volume de sa tétralogie, David Peace va dévoiler la face cachée de ces années noires.






Comme le dit Maurice Jobson dans sa dernière prière : « Je ne fais pas le bien dont j’ai envie, mais le mal dont je n’ai pas envie est ce que je fais. »

Mon avis :
Et voici la dernière étape,  le dernier opus du Quartet du Yorkshire ! Je vous le dis tout de suite, c'est un MONUMENT ! Comme ça si vous n'avez pas envie de lire ce qui suit vous pourrez passer tout de suite à la lecture de ces 4 bouquins qui pour moi sont une "fameuse découverte" dans le domaine de la littérature noire.

Contrairement aux romans du genre on pourrait aisément penser que le quatrième volume, celui qui clôture ce quartet, sera celui de toutes les révélations, je vous dirais que oui .. et non ! J'ai été obligée de retourner sur quelques informations précédentes pour y voir plus clair. Pour mieux comprendre aussi comment les fils étaient tirés.
Ce n'est pas un livre que l'on lit en vitesse, c'est une lecture sur laquelle on est obligés de s'attarder. L'écriture toujours aussi hachée, meurtrie, à la fois profonde et survolée est empreinte de violence, de souffrance et de rédemption.
David Peace est vraiment doué !

Trois voix s'y font entendre, John Piggott l'avocat,  Maurice Jobson le super-intendant de la police et Bj l'indic. Tour à tour avec des allées et venues incessantes entre les époques, entre les faits, entre les pensées et les cauchemars des uns et des autres.

1983, Hazel Atkins disparaît, Jobson enquête. Mais quel rapport avec les disparitions de 74 ?
Piggott se retrouve à défendre Michael Myskin enfermé depuis très longtemps pour le meurtre de Clare Kemplay.
Piggott semble avoir besoin de rédemption.
Jobson se souvient.
Bj se dévoile ...
Tous les flics sont-ils pourris à l'extrême ? Il semble bien que oui !
Dans cette Angleterre, à cette époque, celle de "M'dam Maggie" Thatcher, dans le Yorkshire sombre et gris, se cachent d'horribles secrets. Peu de temps après, avant et pendant que l'éventreur sévissait.

Certains, comme Piggott veulent faire la lumière,  mais le veulent-ils vraiment ?

"Par les trous on voit la lumière et il y aura justice et vengeance car par les trous on voit la lumière,  une lumière sainte pour une guerre sainte"

Les retours incessants aux affaires Atkins, Kemplay, etc ... nous retiennent avec beaucoup de concentration. Faut s'accrocher pour suivre, ou refaire quelques retours en arrière (merci la lecture numérique).

Le retour sur Jack Withehead "Le reporter de l'année" est aussi très révélateur,  oui mais révélateur de quoi ?
Au lecteur de suivre les pistes, de s'attarder et de démêler.
Chacun sa croix !

Captivant, envoûtant, sont les qualificatifs que je citerais à propos de 1983 !
Et si vous ne comptez pas lire ce Quartet avec attention, si vous voulez des explications toutes cuites ... si vous cherchez un page-turner,  ben alors, allez voir ailleurs ! Abandonnez l'idée de le commencer.
Il est impératif de lire les 4 livres dans l'ordre ! Ça vous l'aurez compris.
Par contre si vous aimez les complications, lancez-vous !
Fabe


La même chambre, toujours la même chambre ; soda, pain rassis, cendres dans la cheminée.
Je suis en blanc et je noircis jusqu’au bout des ongles, pousse une coiffeuse à dessus de marbre devant la porte pour la barricader, tombe, trop fatigué pour tenir debout, effondré dans un fauteuil au dossier brisé, vertige et je ne sais plus où j’en suis, mots dans ma bouche, images dans ma tête, ils ne signifient rien, égaré dans ma chambre, comme si j’étais tombé de très haut, brisé, et que personne ne puisse recoller les morceaux, messages : personne ne reçoit, ne décode, ne traduit.
— Comment tu vas payer le loyer ? je chantonne.
Seulement des messages envoyés depuis ma chambre, pris au piège entre la vie et la mort, une coiffeuse à dessus de marbre devant la porte.
Mais pas pour longtemps, plus maintenant.
Seulement une chambre et une femme en blanc, qui noircit jusqu’au bout de mes ongles, et des trous dans ma tête, seulement une femme qui entend des pas sur les pavés, dehors.
Seulement une femme.

vendredi 9 mai 2014

Psycho Killer - Anonyme

Éditeur : SONATINE (17 octobre 2013) 358 pages

Tout semble paisible à B Movie Hell, 3672 habitants. Jusqu’au jour où un tueur mystérieux portant un masque en forme de crâne, surmonté d’une crête iroquoise rouge, se mette à assassiner tranquillement certains des habitants de la ville. Le FBI confie l’affaire à un couple d’enquêteurs, Milena Fonseca et Jack Munson, surnommé le Fantôme, spécialiste des opérations clandestines. Bientôt de mystérieux liens apparaissent entre cette terrifiante série de meurtres et un projet top secret du Département d’État, l’opération Blackwash. Alors que la paranoïa s’empare de la ville, la collaboration entre le FBI et les autorités locales s’annonce difficile. Les habitants de B Movie Hell, bien décidés à garder leurs nombreux secrets, entendent en effet résoudre seuls et sans aide extérieure cette histoire aussi terrifiante qu’énigmatique.

Après sa tétralogie consacrée au Bourbon Kid, Anonyme nous offre un slasher jubilatoire en forme de clin d’œil aux films de série B. Est-il possible d’y résister ?





Mon avis :

Les aventures du Bourbon Kid m'avaient énormément amusée avec cette écriture innovante et complètement déjantée,  alors il fallait absolument que je m'attaque à "Psycho Killer" ! Voilà qui est fait !

Ici, contrairement au Bourbon Kid le scénario est "classique". Un barbouze, Jack Munson, presque à la retraite qui aime trop la bouteille etc ... et une femme haut-gradée qui l'accompagne sur une enquête "top secret". Quoi de plus inhabituel hein...

Le tueur, Joey Conrad est surnommé l'Iroquois, pourquoi ? car quand il assassine les gens il est affublé d'un masque en forme de crâne surmonté d'une crête rouge et sème la panique dans la petite bourgade de B Movie Hell tenue et gérée par un seul homme qui dirige et commande la plupart des habitants.

L'histoire se laisse lire très facilement vu qu'il n'y a que de l'action et des dialogues directement en rapport avec l'enquête. Des dialogues courts, précis qui entrent directement dans le vif du sujet, comme dans les livres précédents de l'auteur Anonyme.
La description des personnages de ce roman est quand même assez cliché, que ce soit au sujet de Bébé, une jeune prostituée qui a une place prépondérante dans le roman ou bien de Sylvio Mellencamp le tenancier du "Minou joyeux", (ben oui quoi, c'est le nom du bordel ... c'est astucieux non ? Pffff ).
Toute l'histoire tourne autour de Bébé, qui elle n'est au courant de rien, évidemment !
Beaucoup de poursuites et beaucoup d'action vont mener cette histoire tambour battant.

Le déroulement de l'enquête va vite, heureusement ! Si on devait se perdre dans des descriptions à rallonge je pense que j'aurais abandonné la lecture mais l'auteur n'a pas fait dans les longueurs, il va droit à l'essentiel.
Si seulement il avait inclus aussi un peu de la folie de ses livres précédents, ces situations "cliché" seraient passées comme une lettre à la poste. Mais voilà ... je trouve que ce n'était pas assez déjanté pour détrôner "Le livre sans nom" et les suivants !

Le tueur est doué et astucieux et on devine vers la moitié du livre qu'il est loin d'être fou. Il est aussi très énigmatique puisque l'auteur n'en parle qu'au travers de ses agissements et des indices que relèvent les enquêteurs. L'Iroquois se borne à découper un tas de gens en rondelles, mais il suit un chemin bien défini ...
Les situations et les pistes de l'enquête se précipitent bien, là l'auteur s'est donné la peine de ne pas nous laisser nous endormir.
Il nous délivre des surprises et des rebondissements auxquels je ne m'attendais pas, du moins pour quelques uns. Quand à l'enquêteur Munson, il est tout à fait crédible dans son rôle et il va nous amener au dénouement avec une logique parfaite.
Par contre il manque le visuel, vous savez ... cette ambiance, cette description des lieux qui nous font mieux nous imaginer le terrain sur lequel on évolue. Dommage !

L'épilogue est un peu (un tout petit peu seulement) surprenant et laisse présager qu'il y aurait peut être une suite. Ceci n'est qu'une opinion toute personnelle.
Ce dernier roman de l'auteur Anonyme est un bon tourne-pages ... mais sans grande valeur d'écriture.
Ça se laisse lire mais ne laisse pas la trace que m'a laissé le Bourbon Kid. (Même si le Bourbon Kid n'avait pas beaucoup de valeur dans l'écriture non plus, mais il avait le mérite d'être très surprenant et fort déjanté).

Conclusion : mon avis est mitigé. Ni très bon ni très mauvais ... mais qui devrait plaire à beaucoup d'autres lecteurs.
Fabe